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C'est la dynamique des paradoxes qui fera tomber Sarkozy

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C'est la dynamique des paradoxes qui fera tomber Sarkozy Empty C'est la dynamique des paradoxes qui fera tomber Sarkozy

Message par jonas2 Jeu 11 Fév - 18:10

C’est la dynamique des paradoxes qui fera tomber Sarkozy.

Les petites phrases de Nicolas Sarkozy ne sont pas assez écoutées. C’est dommage car elles sont aussi révélatrices d’un style politique qu’éclairantes pour notre avenir. Prenons ce défi permanent, tout entier contenu dans le fameux " les commentateurs, ils commentent. Moi je suis du côté des acteurs, donc j'agis". Parfois avant d’agir, avant de lancer un boomerang par exemple, peut-être serait-il bon d’écouter ceux qui commentent et pourraient révéler des choses sur la trajectoire des boomerangs. Ceci éviterait des retraites dont le piteux le dispute au claironnant de la charge. Car les postures de matamore à propos d’identité nationale, croissance, déficits publics, environnement, république irréprochable, chômage, banlieues, mérite, gouvernement resserré, sans abri et autres droits de l’homme, n’ont jamais abouti aux leçons de bonne gouvernance que Sarkozy entendait donner au monde, loin s’en faut. Heureusement que la crise, l’ONU, l’Europe et l’insuffisance de sa garde rapprochée sont arrivés à point nommé pour limiter le ridicule.

Le rôle déterminant joué par les paradoxes et autres hypothèses autovalidantes ne saute pas aux yeux dans la vie de tous les jours. Ces fautes, le plus souvent vénielles pour le commun des mortels, peuvent en revanche avoir des effets dévastateurs lorsqu’elles sont le fait de dirigeants. Sarkozy, dépassé par les contraintes paradoxales qu’il a lui-même déclenchées est celui qui va réhabiliter les vraies valeurs de gauche.

Les paradoxes sont comme des boomerangs

Paul Watzlawick*, a bien cerné cette propension de l’homme à construire sa réalité de la réalité, cette tendance fréquente à confondre la carte et le territoire :

« [...] une idée, pour peu qu'on s'y accroche avec une conviction suffisante, qu'on la caresse et la berce avec soin, finira par produire sa propre réalité »,
et d’illustrer la chose par l’anecdote de l’homme dans un train français qui se lève de temps en temps, baisse la vitre et disperse de la poudre au vent. A la jeune femme qui l’observe et lui demande ce qu’il fait, il répond : « C’est de la poudre anti-éléphants ». L’interlocutrice sourit : « Mais il n’y a pas d’éléphants par ici». Et l’homme de répondre, sûr de son fait : « Justement ! C’est que ma poudre est efficace ! ».

La gesticulation sarkozienne qui n’est pas avare de paradoxes et d’arroseurs arrosés est de ce tonneau. Sarkozy et ses spin doctors confondent la carte et le territoire. Ce sont eux qui appellent le plus fort au respect de l’identité nationale et qui sont dans le même temps incapable d’en tracer les contours tant qu’un débat national n’aura pas « abouti » sur le thème. Il était fatal que cette manœuvre destinée à aspirer les voix du FN se retourne contre ses promoteurs. Car pour reprendre, avec un pince-nez, la remarque de Le Pen « on préfère toujours l’original à la copie ».

Quand le mensonge et la manipulation sont institutionnalisés à ce point, les risques de retour de boomerang se multiplient. On retrouve d’ailleurs ces mêmes séquences d’arroseurs arrosés dans presque toutes les initiatives du gouvernement. Les exemples pullulent : multiplication de caméras de surveillance et de fichiers de police combinée à la dictature du chiffre et qui aboutissent à une pléthore d’informations non seulement liberticides mais inexploitables compte tenu de leur encombrement même, injonctions paradoxales et coups de menton visant à imposer par décret des symboles de la liberté comme Guy Môcquet ou Albert Camus ; politique du tout sécuritaire qui finit par vraiment terroriser tout le monde presque aussi efficacement que le terrorisme.

C’est ainsi également que les démentis des milieux autorisés inspirent de suite une curiosité sur l’air de « s’ils démentent c’est qu’il y a une rumeur. Or il n’y a pas de fumée sans feu. Donc, c’est sans doute l’inverse qu’il faut croire ». Ceci participe d’ailleurs d’un phénomène plus général de montée du scepticisme en France. Ne sachant plus démêler le vrai du faux, le citoyen part du principe que tout est bidonné. Juste retour de boomerang et tant pis pour les campagnes de vaccination.

L’exercice du pouvoir c’est le lancer de boomerang. Quand on lance trop fort, la trajectoire retour prend rendez-vous avec le coin de votre gueule. C’est ainsi que crise aidant, le boomerang des certitudes ultra-libérales et managériales associées vient de rencontrer avec fracas la gueule de ses promoteurs. Si l’on peut déplorer que tout le monde trinque, il est quand même assez jubilatoire de constater que si toujours plus de la même chose produit toujours plus des mêmes effets, trop de la même chose produit l’effet inverse de celui escompté.

Cette frénésie de la « rupture » par la multiplication d’actions bien visibles et médiatisées a d’ailleurs contaminé de nombreux services de l’Etat. Ainsi, les dispositifs d’alerte avec les fameux placements en vigilance orange. Qui n’a jamais soupçonné les responsables de l’activer un peu vite pour se mettre à l’abri d’un petit peuple procédurier prompt à engager leur culpabilité à la moindre suspicion de négligence ? Comme le principe de précaution à l’égard du judiciaire l’emporte sur la prévention des risques, plus grand monde ne prête désormais attention à cette alerte au loup qui n’arrive jamais ; jusqu’au jour où…

Le paradoxe le plus évident est celui que sécrète ce capitalisme à propos duquel Cornélius Castoriadis a écrit qu’il n’a pu fonctionner […]

« Que parce qu’il a hérité d’une série de types anthropologiques qu’il n’a pas, et n’aurait pas pu créer lui-même : des juges incorruptibles, des fonctionnaires intègres et wébériens, des éducateurs qui se consacrent à leur vocation, des ouvriers qui ont un minimum de conscience professionnelle. Ces types ne surgissent pas et ne peuvent surgir d’eux-mêmes, ils ont été créés dans des périodes historiques antérieures, par référence à des valeurs alors consacrées et incontestables ».

A l’heure qu’il est, ces types anthropologiques et ces valeurs sont écartés ou effacés avec acharnement par ce même capitalisme débridé qui ne pourra donc plus compter sur eux pour fonctionner.

Le second effet boomerang qui renforce le premier est que plus le capitalisme façonne l’économie mondiale à son seul profit, plus les risques d’un embrasement généralisé ne se dessinent. L’équilibre précaire qui est pour l’instant maintenu va fatalement se rompre, le tout est de savoir comment. L’affrontement entre capitalistes rivaux n’est pas le scénario le plus certain. Des affrontements sociaux et nord/sud deviennent de plus en plus probables qui mettront à mal ce système à bout de souffle et qui se sera lui-même condamné pour avoir lancé le boomerang beaucoup trop fort.

D’ailleurs, le mur des théories managériales dominantes vient de chuter lourdement. Raidi dans sa culture du résultat à n’importe quel prix il a été pulvérisé par la crise générée en partie par ces mêmes théories dogmatiques.

Au bout du compte, le plus habile pour que le pouvoir chute ne serait-il pas de l’encourager à poursuivre sa poussée dans le sens où ça penche ?


Ne dites surtout pas à Sarkozy qu’il est celui qui œuvre le mieux pour réhabiliter une vraie gauche.


Dans peu de temps, l'ère Sarkozy nous apparaîtra comme un bien, car elle nous aura dispensé les leçons qui faisaient besoin pour raviver les couleurs de notre cher État démocratique, laïc et républicain.

La traversée du Sarko nous permet, aujourd'hui, de réviser ce qui fait sens dans nos institutions; sens et vertus que nous avions peut-être oubliés un peu vite. Elle nous révèle crûment tout ce que nous ne savions ou ne voulions pas voir des insuffisances et accommodements de notre système. Elle réhabilite le combat pour la défense des valeurs de la démocratie, de la justice et de la laïcité que nous avions la naïveté de considérer comme définitivement acquises. Sarkozy nous donne finalement en creux, et bien sûr sans le vouloir, les leçons d'une véritable "politique de civilisation" dont il n’a pas la moindre idée. Ses leçons sont tellement motivantes qu’elles donnent envie de multiplier les travaux pratiques.

Sarkozy réveille nos résistances assoupies. C'est peut-être lui finalement l'avenir d’une vraie gauche. C'est pour cette raison qu'il faut faire notre miel de son aveuglement sectaire avec ses couacs, ses provocations, sa morgue et son mépris des plus faibles.

Il réhabilite la grève. Désormais quand il y a une grève 70 % des Français s’en rendent compte, la soutiennent et ne parlent plus de prise d’otages.

Il remet la lutte des classes au programme. Car elle est là, bien réelle avec un rejet qui commence à avoir des relents de haine pour la classe dominante. La haine n’est d’ailleurs pas, au passage, ce qui peut arriver de mieux dans une démocratie.

Il accule à la lutte sans concession. Ses démonstrations de force et roulements d'épaules sans risque face à un peuple de salariés tétanisés par le spectre d’une perte d’emploi possible deviennent contre-productifs. Le chômage est devenu une réalité pour beaucoup de salariés qui savent qu’ils n’ont plus rien à perdre. Et quand on n’a plus rien à perdre on retrouve le sens de la lutte et l’on retrouve aussi et surtout ceux qui ont déjà tout perdu. Le chacun pour soi perd du terrain et des forces se rejoignent.

Il rassemble tout un peuple dans la défense d’institutions qui ont fait leurs preuves, même si elles sont imparfaites. Sarkozy prône la rupture en méprisant les institutions, les élus, les acquis sociaux et les grands corps de l'État. L'école, l'enseignement supérieur, la recherche, la justice, l'armée, la gendarmerie et bien d'autres institutions, sont bousculées à la hussarde au nom des sacro-saints principes édictés par la soif de rupture et les vautours de la grande foire du concurrentiel.

Il assure avec beaucoup de simplicité la défense et l’illustration des vertus du dialogue en nous en privant ; tout simplement. Est-il une plus grande leçon sur ce chapitre que le fameux « j’écoute mais j’tiens pas compte » ?

Il prétend avoir barre sur les évènements et, après avoir défendu sa frénésie ultra-libérale comme une sorte d'allégeance à l'inexorable, il en appelle aux vertus de mesures dites de gauche.

Il nous démontre finalement que la rupture libérale, pourtant donnée comme indiscutable, ne s'exerce pas forcément dans le sens d'un progrès. Ceux qui ne le savaient pas encore découvrent ainsi grâce à lui que résister n’est pas synonyme de régression ; bien au contraire.

Sarkozy devrait se demander si les mouches n’ont pas changé d’âne en constatant que les opposants à sa ligne sont désormais bien plus nombreux que ses courtisans, soutiens de circonstance qu’il continue à servir et flatter mécaniquement.

D’ailleurs, si l’on y regarde d’un peu plus près, des reculs peu discrets et de moins en moins prudents se multiplient, même parmi ceux qui ont contribué à le porter là où il est.

*Paul Watzlawick est un des piliers, avec entre autres Gregory Bateson, de l'institut de recherche mentale de Palo Alto en Californie, une référence dans les domaines des théories de la communication, de la psychothérapie et de la thérapie familiale.
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Message par eelisa Ven 12 Fév - 0:19

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